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samedi 31 octobre 2020

Recyclage / De la bienveillance

 De la bienveillance


D’abord il ne me reste plus qu’aujourd’hui pour utiliser cette fonctionnalité de Facebook. Ensuite en me relisant (et notamment mes billets de premier confinement) je réalise que je n’ai toujours pas écrit ce fameux billet sur la bienveillance. Enfin, je me suis livrée récemment à un petit exercice de bienveillance appliquée sur lequel je voulais revenir.


Tout à commencé par le choix de décor de profil de Fambodji. Fambodji, je la connais de ma vie d’avant chez Aide et Action, grande dame, militante de l’éducation pour tou-te-s. A l’époque elle portait des tenues colorées, et des mouchoirs de tête savamment noués... La dernière fois que nous nous sommes vues irl, c’était à Ouagadougou lors d’un séminaire, elle avait fait venir un couturier et avait insisté pour que je me fasse faire une tenue (tenue que je ne peux maintenant plus porter - sous peine de me faire accuser d’appropriation culturelle mais ceci est une autre histoire). Nous avions ri ensemble lorsque le couturier, prenant mes mesures avait qualifié mes mensurations d’africaines (“elle est taillée comme une fille de chez nous”). Plus tard dans la même semaine je lui avais rapporté de la pommade au karité d’une coopérative... la même pommade ou presque, celle qui me sauve la vie (enfin la peau) chaque hiver, que vend la malienne voilée et forte en gueule du Proxi du Bras de Fer, dieu la bénisse !
Mais je m’égare. J’avais constaté au fil du temps et des publications Facebook l’implication religieuse croissante de Fambodj, après tout c’est son choix me disais-je. Et puis est apparu - peu après l’assassinat de Samuel Paty - ce décor de profil : “Respectez Mahommet, prophète de paix et de tolérance”. Je l’ai donc interrogée sur la signification de ce profil :

  • un appel aux croyants à respecter la parole (de paix et de tolérance donc) du prophète, ou
  • un appel aux non-croyants (j’ai peut-être même écrit mécréants) à respecter un prophète qui n’est pas le leur ?

Je note d’ailleurs qu’elle ne m’a pas vraiment répondu. En revanche ses amis Facebook oui.


Premier constat : nous n’étions pas dans la même posture. Je cherchais à comprendre et à expliquer (pas à justifier), en face on cherchait à convaincre et argumenter...


Deuxième constat : dans ces arguments, certains étaient documentés, bien documentés. Ne jamais oublier que dans la plupart des pays francophones et anciennement colonisés, les élites sont percluses de culture et de sources d’informations françaises. De l’interdiction de Hara Kiri pour atteinte à “la figure sacrée” du chef de l’Etat, aux déclarations de Chirac, jusqu’à l’arrêt du 25 octobre 2018 de la Cour Européenne (finalisé le 18 mars 2019) - je précise que le lien n’est pas vers l’arrêt lui même mais vers un commentaire, les références furent nombreuses, et le climat n’était (malheureusement) pas propice à en apporter d’autres (et puis, j’y reviendrais, j’ai choisi de tenir cette position d’écoute de préférence à une entrée directe arguments contre arguments).


Troisième constat : j’ai pu mesurer la profondeur du fossé, ou comme je l’écrivais à Elodie, j’ai vraiment, par moment, eu l’impression que l’abyme me regardait. Une blessure d’amour propre qui - peut-être - n’est pas seulement confessionnelle, mais qui est profonde. Peu sur ce mur pour rappeler que le prophète lui-même et de son vivant se fichait pas mal de ses détracteurs, ou que les premières victimes des islamistes dans le monde sont de loin et en nombre, des musulmans. Une hiérarchie des normes - pour reprendre un parallèle juridique - bouleversée, et où la vie humaine ne pèse rien face au sacrilège d’un gribouillis.

Quatrième constat : quittant ces rives quelque peu agitées que vois-je : ElodieLaurence parmi d’autres prennent leur casquette d’athées militantes. Je vous résume en gros : “les religions - toutes les religions, c’est du caca de prélat ou de bigote rassie, de l’endoctrinement et de l’asservissement, de la guerre de religion en puissance, non à l’opium du peuple...” ?
C’est une opinion, c’est la leur, et elles l’expriment Youhou !


Et moi dans tout ça je fais quoi ?


Je dis stop aux postures caricaturales (désolée pour cette référence mais elle me semblait particulièrement appropriée) ! Arrêtez, mais tous, d’asséner vos vérités ! Prenez le temps d’écouter, de vous poser. Accueillez la parole des autres, ignorez les injures et accrochez-vous à la moindre étincelle de bienveillance et de dialogue. La haine de l’autre est toujours une haine de soi (et je pourrais ici entrer dans une longue disgression sur le fait que des caricatures - non des pratiquants eux-mêmes pris dans leur ensemble - mais des dérives de certains, de la bigoterie et de l’intégrisme - ne sont pas des manifestations de haine mais une invitation - par le rire - à prendre du recul sur soi et sur l’image que l’on donne de soi - mais ce n’est pas le lieu). Soyez bienveillants envers les bienveillants, au mieux ignorez les autres (ou si vous êtes choqué comme j’ai pu l’être par @Aïssatou, répondez simplement, calmement et respectueusement en disant pourquoi et en quoi ces propos vous choquent, sans chercher à choquer en retour - même si c’est violent et que la tentation est forte, surtout si c’est violent et que la tentation est forte). Les caricatures vous choquent ? Vous avez le droit d’être choqués et de l’exprimer, y compris sur la place publique, pas celui d’appeler à la haine et au meurtre. Dites, posément - en faisant des vraies phrases - pourquoi et en quoi cela vous choque, et débattez-en entre vous, ni plus ni moins - en somme - que l’exercice que proposait Samuel Paty à ses élèves.


Je ne vois pas d’autre chemin que celui-là. Il est difficile, il requiert de la patience et un rien qu’un peu de maîtrise de soi, mais tous les autres sont des impasses. L’extrémisme ne se combat pas par un autre extrémisme...

Cet appel vaut évidemment pour ce sujet comme pour d’autres...

La voilà, ma bienveillance à moi (sur un air de Julien Clerc), le choix d’une voie difficile et escarpée, à 2 000 lieues de toute forme de gnangnanterie.

Sur ce confinez bien et ne passez pas trop de temps sur les réseaux quand ils deviennent asociaux.

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