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mercredi 3 juin 2020

Recyclage / Georges, Adama, mais aussi Cédric, Steve et tant d'autres...

 Georges, Adama, mais aussi Cédric, Steve et tant d’autres...


Hier les restaus et cafés ouvraient, en terrasse à Paris. Chez moi la principale conséquence aura été l’invasion du trottoir d’en face par le restau du rez-de- chaussée, avec lequel on est fâchés parce qu’on n’a pas fini d’entendre sa soufflerie installée sauvagement et en dépit de toute réglementation juste au dessus de nos fenêtres côtés courettes... Choix cornélien par une chaude soirée d’été : ouvrir côté rue et jouir du boucan de la terrasse, ou côté courettes pour le doux vrombissement de la soufflerie, ou des deux côtés pour le courant d’air avec combo décibels ! Ce devait être l’événement du jour, ce ne fut qu’un épiphénomène...


Tout a commencé par des photos sur le groupe facebook PARIS 17 ème (75017), à moins que ce soit le défilé de motards rue des Batignolles, je ne sais plus très bien. Un petit moment de stupeur en mode “euh c’est des photos d’ici et maintenant ça ?” Une foule dans la rue, devant le nouveau palais de justice et le nouvel hôtel de police ? Indice : même si les distances physiques ne sont pas respectées, beaucoup ont des masques ET ne sont visiblement pas des casseurs”.



1er constat donc, je n’étais pas au courant, mais genre pas au courant du tout... je savais tout des déclarations du chef de la police de Houston, du #blackouttuesday et des publications ou photo de profil noires toutes noires... et je ne savais pas qu’un appel à manifester à 2km de chez moi avait été lancé, puis interdit (ou plus exactement dont l’interdiction avait été rappelée) par le préfet de Paris. Les bulles, c’est une réalité et c’en est flippant ! Et 1 point pour la distanciation sociale !


2ème constat : visiblement c’était plutôt bon enfant, pas monochrome et donc plutôt réjouissant, rafraîchissant avant l’intervention/dispersion par les forces de l’ordre. Après la dispersion un petit groupe a donc descendu la rue des Batignolles, sous les applaudissements (au fenêtres et aux terrasses) et en nous prenant à parti “Ne nous regardez pas, rejoignez-nous !” (sur la scansion de “1ère, 2ème, 3ème génération, ça rappellera des souvenirs à certains). Et bon, bien, on dira ce qu’on voudra mais c’est vrai que ce côté black/blanc/beur #BlackLivesMatter ou tout ce que vous voudrez fait chaud au cœur...

Mais... ben oui il y a des mais sinon ce serait trop simple

De quoi t’es-ce donc au sujet qu’on cause ? et qu’est-ce qu’on compare ? D’un racisme institutionnalisé logé au cœur des forces de maintien de l’ordre ? Une forme de racisme d’Etat comme y disent ?


Et Steve Canisso, et Cédric Chouviat, et Rémy Fraisse alors ?


L’éclairage était mauvais on les aurait confondus avec des noirs ? OK donc on parle d’une doctrine de maintien de l’ordre qui mériterait grandement d’être révisée et d’une impunité (en tous cas perçue) des forces de l’ordre qui nous éloigne un peu beaucoup de l’exemplarité républicaine d’un serviteur de l’Etat ?


Un peu des deux dans un grand gloubi boulga et c’est un peu ça qui me gène quand même, aux entournures et au-delà !


Ne pointer que le racisme (supposé mais non démontré) dans le décès d’Adama Traoré, c’est quand même faire fi un peu vite de Cédric, Steve et Rémy pour ne parler que de ceux qui ont fait la Une des journaux...


Ne pas admettre que ce racisme existe s’abattre comme une volée de moineaux corbeaux sur Camilla Jordana (dont la déclaration était - quand même - d’une bêtise abyssale cela dit de même que son choix de chant à ladite manif “time to pick up our guns” était au mieux une provocation calculée - au pire une autre bêtise), c’est faire fi d’une autre réalité et ouvrir un boulevard aux identitaires racisés de tout poil.


Bref en tout l’outrance est mauvaise conseillère et en tout je la retrouve souvent... #OuPas.


Il y a dans la police (et la gendarmerie) un problème de doctrine sécuritaire, un problème d’impunité combinée à l’omerta, mais aussi de racisme ou a minima de biais culturels, mais aussi une réalité d’exercice des missions en milieu hostile voire de guet-apens qu’on ne peut pas juste, comme ça, mettre au rang “ des risques du métier, ils l’ont choisi tout ça”. Le tout forme un cocktail détonnant et ne pas le reconnaître, ne pas s’attaquer au-x problème-s est une faute politique. Bref il n’y a pas que des violents, pas que des racistes, pas que des sexistes... mais il y en a et le nier n’aide pas à apaiser la relation avec la population, ni à valoriser ceux qui font correctement, et avec dévouement, leur métier.


De même que nier l’existence, dans certains quartiers, d’éléments radicalisés, ultra violents ou juste désoeuvrés, dopés au discours victimaire n’aide pas non plus à se sortir le c... des ronces. Je vomis les identitarés , mais vraiment...


Pas pour leur diagnostic, il est construit, il est fondé, il fait sens... Nier le racisme systémique, faire de l’angélisme universaliste ou tout ramener à la question sociale, ne résoud rien... Je suis raciste, ça me fait mal de l’écrire, mais le nier fait encore plus de dégâts. Pourquoi affirmer un tel truc ? Parce que quand je vois une femme noire avec un bébé blanc je pense nounou, et quand je vois une femme blanche avec un bébé noir (ou métis mais c’est pareil en fait - autre signe manifeste que NOUS sommes racistes - vous avez sans doute remarqué, Obama est toujours noir, pas blanc alors qu’on est d’accord il est les deux à parts égales !), bref je me reprends quand je vois une femme blanche avec un bébé noir - je peux penser adoption avant même d’envisager le couple mixte. Je suis raciste quand je me félicite d’avoir cédé ma place dans le bus à ce papa noir avec ses enfants en bas âge - il n’y a pas plus de fierté à avoir à le faire pour lui que pour n’importe quel papa, n’importe quelle maman. Je suis raciste parce que je vis et j’ai été éduquée dans une société ethnocentrée (et donc dans laquelle ce qui n’est pas blanc est noir CQFD) et que je l’ai tellement intériorisé que je ne m’en rends pas (toujours) compte. Avoir des amis noirs n’y change rien, ou si peu...


J’ai aussi des préjugés sur les pauvres - avec ou sans dents - sur les riches, les bistros et les coiffeuses, les bretons (et surtout les bretons amateurs de bistros) et même les catalans... mais de même que la plupart des hommes ne réalisent pas toujours que leur vision du monde est patriarcale et sexiste, il peut m’arriver d’oublier que ma vision du monde est filtrée, racisée donc (#maispasque, socialement filtrée aussi etc... je ne vais pas vous la refaire) !


Donc presque OK sur le constat... En revanche les solutions... Elles reposent sur un substrat d’une grande perversité intellectuelle : elles tirent leur légitimité d’une aspiration à l’universalisme pour mieux saper l’idée même d’universalité. (J’ai de la suite dans les idées j’en ai de même et pour les mêmes raisons contre les féministes différentialistes - raison pour laquelle, on y reviendra peut-être #oupas je vomis également l’écriture inclusive - grammaticalement le “masculin” est un neutre - le mâle n’a pas de genre grammatical #épicétou).


Leur “nous” exclut. Non ma chère Rokhaya l’animalisation du corps de la femme n’est pas propre à la femme africaine vue par l’homme blanc, message des chiennes, truies, grues et autres poules aux panthères et aux tigresses... Quand nous avons des combats communs, menons les ensemble et pas isolées... Ce chemin-là me semble fructueux... Le tien ne fait que diviser encore plus, il cherche la revanche avant de chercher la paix... Je n’ai pas vécu ce que tu vis... et alors ? Que sais tu de moi d’abord ?


“Ne nous regardez pas, rejoignez nous” je ne sais pas, je ne saurai peut-être jamais si ce slogan était spontané... mais adressé aux parisiens aisés d’un 17ème hybride - entre l’avenue de Clichy et Malesherbes - celui là je suis prête à y adhérer. Cette invitation-là je suis prête à l’accepter. Parce que Césaire avait raison, parce que le colonialisme nous a autant abîmés qu’il vous a torturés (et on est d’accord tout ça est symbolique et historique, à commencer par le “nous”), parce qu’il a miné le cœur même de l’universalisme.


Je suis certaine d’une chose : ce n’est qu’ensemble qu’on avancera. C’est un chemin exigeant, parce qu’il suppose de l’honnêteté et de la lucidité (et le courage de cette lucidité)... Affronter les réalités, même celles qui dérangent, sans esprit de corps... Accueillir la complexité, refuser le simplisme et ensemble travailler, travailler, travailler... Je ne connais pas d’autre voie !


“Ne nous regardez pas, rejoignez-nous”


Il s’est peut-être passé quelque chose hier, vraiment...


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